5 - L'utilisation textile de l'Ortie


L’utilisation textile de l’Ortie fait surtout référence à la Ramie (Urtica utilis) ou à l’Ortie de Chine (Urtica nivea, ci-dessous) dont l’utilisation dans ce domaine est très répandue et remonte à fort fort longtemps puisque les Égyptiens s’en servaient pour embaumer leurs morts. 

Quelques botanistes en font un genre particulier, le genre Boehmeria, parce qu’elles sont dépourvues de poils urticants (les fameux !), ce qui en rend le maniement nettement plus facile, tu l’admettras.

Allez ! Un peu d’Histoire… ça fait pas de mal !

En Europe, la culture de l’Ortie, même dioïque, pour l’usage textile était déjà répandue au néolithique. 

On a retrouvé, dans l’équipement de la momie Ötzi, datant du Chalcolithique (entre -3350 et -3100), découverte sur un glacier entre l’Autriche et l’Italie en 1991, le fourreau d’un couteau en silex réalisé à partir de fibres d’Ortie et des pointes de flèches qui étaient fixées sur leur hampe par ces mêmes fibres.

Les Égyptiens n'étaient pas les seuls à utiliser l'Ortie pour leurs morts. Il a été découvert au Danemark des linceuls datant de l’âge du bronze (vers -1600) tissés, encore une fois, avec des fibres d’Ortie. 

L’introduction de la culture de la Ramie en Europe est due à l’empire Romain (Encore eux !). Elle y sera, d’ailleurs, cultivée pour sa fibre jusqu’au XIXème siècle. 

 

Au Moyen-âge, l’Ortie était utilisée pour vêtir les paysans mais aussi pour fabriquer des cordages et des fils. On cousait avec de l’Ortie ! Cet usage est attesté en Pologne, du XIIe siècle au XVIIe siècle, jusqu'au remplacement de l'Ortie par le fil de soie.

 

L’industrie textile de l’Ortie connut son apogée en Allemagne et dans quelques régions françaises, notamment à Angers où l’on fabriquait une toile de très bonne qualité entre le XVème et le XVIIème siècle, avant de décliner mais sans jamais disparaître totalement.

En Haute-Savoie, la toile d’Ortie était utilisée pour réaliser des torchons très résistants de couleur verdâtre qui blanchissaient au lavage.

Jusqu’au XIXème siècle, le trousseau des jeunes mariées, en Ecosse notamment, comprenait des draps et des nappes en fibres d’Ortie. Ces trousseaux de linge de maison se sont transmis de génération en génération et l’on pouvait encore en trouver au début des années 2000 dans certains foyers.

 

En grande guerrière, l’Ortie servit aussi à l’armée…

Elle servit en 1812 pour habiller la grande armée napoléonienne, puis fut ensuite délaissée au profit du coton qui était plus facile à exploiter.

En Allemagne, on en retrouve cependant des traces jusqu’à la 1ère guerre mondiale où elle a été utilisée pour confectionner les uniformes allemands, les toiles de tente et leurs sacs puisque, justement, le coton était difficile à obtenir durant cette période.

Pendant la seconde guerre mondiale, le tissu non blanchi de couleur verte servit à fabriquer des parachutes, ainsi que des filets de camouflage britanniques, utilisés lors de la préparation du débarquement de Normandie.

Dans l’après-guerre, l’un des derniers usages connus de la fibre d’Ortie fut l’incorporation de ses fibres dans les serpillières.

Le déclin de l’usage textile de l’Ortie est lié à la difficulté d’obtention de sa fibre qui n’est pas entièrement mécanisable, au coût de la main d’œuvre,  ainsi qu’au faible rendement de la plante en fibres.

Et si le coton a supplanté la plupart des autres fibres textiles végétales dans le monde, en Himalaya, l’usage d’une Ortie locale (Urtica parviflora) pour fabriquer des cordages, des tissus et du papier a perduré jusqu’à nos jours.


Mais, l’Ortie intéresse de nouveau l’industrie textile pour ses qualités écologiques.

En Italie, en Allemagne, aux Pays-Bas, des entreprises la remettent au goût du jour en proposant, entre autres, du linge de maison et des vêtements à base de Coton bio et d’Ortie… Même si ceux-ci ne sont pas constitués à 100 % de fibres d’ortie,  cela suffit pourtant à renforcer la qualité et la résistance de ces tissus

Ce regain d’intérêt pour l’usage textile de l’Ortie peut s’expliquer par la volonté écologique croissante apparue dans les dernières décennies. Sa culture ne demande aucun produit polluant. L’extraction de cette fibre naturelle et biodégradable est beaucoup moins polluante que celle du Coton ou du Chanvre par exemple. De plus, les résidus après extraction de la fibre sont une source de biomasse et peuvent être utilisés pour produire de l’alcool éthylique.

 

Impressionnante Ortie !

Tu veux en avoir dans ton jardin ?

Si tu as la chance d'avoir des graines, la culture des Orties textiles ne présente aucune difficulté. Elles se multiplient très aisément par le semis, par le bouturage ou le marcottage, par la division des pieds, et surtout par la section des racines souterraines ou rhizomes en morceaux de 4 à 5 centimètres de long.

Bien qu’elles exigent des climats différents, l’Ortie blanche et la Ramie préfèrent les terres légères, mais riches, fraîches sans être marécageuses.

Un léger ombrage leur est favorable car même si elles résistent très bien à la sécheresse, elles acquièrent, en étant irriguées en plus, une taille plus considérable.

 

L’Ortie de Chine (Urtica nivea), bisannuelle, appartient aux climats tempérés et convient, par conséquent, à la plus grande partie de la France : elle pousse très vigoureusement et peut donner deux et même trois coupes dans une année.

 

La Ramie (Urtica utilis), vivace, originaire des îles de la Sonde, se cultive à Java, à Sumatra et dans les provinces méridionales de la Chine. On peut l’acclimater dans le midi de la France. Sa puissance de végétation est encore supérieure à celle de l’Ortie de Chine, et l’on en tire souvent quatre récoltes par an.

 

A toi de tenter si tu as la chance d'avoir un jardin !

Dans le prochain article, je t'expliquerai comment tirer du fil de l'Ortie !

 

Herbalistiquement,