4 - L'Ortie, pierre angulaire d'un écosystème


Mais pourquoi l'Ortie pique-t-elle ? Tous les organismes vivants réagissent-ils comme nous, pauvres humains ? 

Bon, tu n'es pas idiot et tu comprends bien que son redoutable mécanisme de défense permet d’éloigner tout animal sensible aux poils urticants et susceptible de couper, manger ou piétiner la plante. D'ailleurs, le prêtre suisse Kuenzle indique, dans ses écrits, que l’Ortie aurait disparu depuis longtemps si elle ne brûlait pas.

 

Mais, les colonies d'Orties sont généreuses : elles abritent aussi une faune d'une grande diversité, justement, à cause de la protection qu'elle offre à ses hôtes ou parce qu'elle constitue un aliment d'une extrême richesse. En tout cas, le résultat est extraordinaire ! 

La Cicadelle se repaît de sa sève et ses feuilles sont dégustées par bon nombre de chenilles de papillons : Petite Tortue (Vanessa urticae, la bien nommée !), Paon du jour, Vulcain, Carte Géographique, etc. Je ne vais pas tous les passer en revue car l’Ortie attire une cinquantaine d’espèces de papillons différents dont les chenilles se nourrissent des feuilles, neutralisant la piqûre des poils urticants en les rongeant à leur base. Malines !

 

Les papillons pondent de préférence sur des Orties qui sont exposées au soleil car elles sont plus nourrissantes pour leurs progénitures aux multiples pattes. On pourra donc se servir de cette astuce d'insecte pour notre propre cueillette !


Ces chenilles, cibles des araignées, sont elles-mêmes parasitées par les œufs d'Ichneumons, insectes ressemblant à des guêpes mais au corps plus fin, qui pond ses œufs dans les chenilles et dont les larves se nourrissent en rongeant l’animal de l’intérieur (c’est dégueu non ?), ce qui limite leur population.

En fait, on rencontre plus d’une centaine d’espèces d’insectes qui sont nourris ou bien hébergés par l’Ortie, attirées par ses feuilles, son pollen ou sa sève.

 

Les escargots et certains mammifères consomment également le jeune feuillage. D'autres animaux ont appris à utiliser l'écosystème développé grâce à l'Ortie.

Les oiseaux insectivores, comme les mésanges bleues, y trouvent, au printemps, de quoi nourrir leurs nichées puisqu’elles sont certaines d’y trouver des insectes, les coquines.

Elle constitue aussi un terrain de chasse pour la belette, la fouine et le hérisson.

Les graines sont consommées par les perdrix, les faisans, les sizerins flammés ou encore les campagnols.

Les fauvettes et les rousserolles y construisent leur nid pour se protéger des prédateurs. Même réflexe chez les oies et les canes sauvages qui viennent y pondre leurs œufs pour se protéger.

Elle sert aussi de gîte pour les biches et les chevreuils qui s’y sentent en sécurité pour élever leur faon.

Les lapins également n’hésitent pas à venir s’y réfugier.

On rencontre également des diptères qui creusent des galeries protectrices dans la plante, dans lesquelles les larves se développent en toute tranquillité. Certaines larves de coléoptères comme celles des charançons phyllobius grandissent même à l’intérieur des tiges d’Ortie !

Bref, l’Ortie, tu l'as compris, est à la base d’un véritable écosystème ! Plus de 30 espèces d'insectes lui sont directement inféodés.

On pourrait penser que cela s'arrête là... Mais pas du tout ! Il existe des plantes qui n'ont pas peur du tout de notre amie et pousse même le vice jusqu'à la parasiter comme la Cuscute et le Liseron.

 

Elle est également la cible d’un champignon (Puccinia urticae-caricis) qui provoque la formation de galle  sur celle-ci.

 

Les femelles de Dasineura urticae qui sont des insectes appartenant à la famille des cécydomides viennent pondre leurs œufs sur les jeunes feuilles d’Ortie. Les larves, à leur naissance, vont venir agresser le tissu végétal, provoquant ainsi l’apparition d’excroissances de petite taille, de formes et de couleurs variables : plus ou moins allongées, du vert tendre au rose violacé. Les larves vont cibler préférentiellement les nervures des feuilles, les tiges et les fleurs. Chaque larve provoque la formation d’une seule galle où elle pourra ainsi grandir à l’abri des regards. Ces galles peuvent être nombreuses et accolées les unes aux autres, ce qui donne cette impression qu’une même loge peut renfermer plusieurs larves. Il faut un mois à la larve pour terminer sa croissance et s’extirper de la galle. Elle ira ensuite s’enkyster sous terre...

Toujours si inabordable l’Ortie ? Pas tant que ça, non ?

 

Alors, si elle tient les humains à distance, c’est peut-être seulement pour qu’on ne la dérange pas dans l’accomplissement de sa tâche ou qu’elle ne se laisse approcher que par ceux qui la respectent vraiment…

 

D'ailleurs, pour ceux qui savent, ses utilisations sont nombreuses... ALors, qu'attends-tu pour lire le prochain article sur son utilisation textile ?

 

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